Disto studio : le studio des jeux distordus


Retrouvailles au coin du feu

Soirée-enquête prête à jouer


Une petite rencontre ludique à distance, gestes barrières obliges, avec Maria Paloma Sanchez et Luc Anuszewski, un couple de couteaux suisses Strasbourgeois, les créateurs du Disto Studio, un studio d’édition et de création de jeux distordus situé à Strasbourg.

Maria, Luc, pouvez-vous vous présenter

(Maria) J’ai vécu à Madrid, ma ville natale, Mexico et Buenos Aires avant de mettre les pieds à Strasbourg.

(Luc) Je suis originaire de Lille et je suis arrivé à Strasbourg pendant mes études.

Nous sommes tous les deux architectes, et nous nous sommes rencontrés il y a 5 ans à l’école d’architecture de Strasbourg. À partir de ce moment, nous sommes devenus inséparables, toujours à faire différents projets ensemble, d’abord pendant les études, puis en agence d’architecture et enfin avec la création de Disto studio.

Comment en vient-on à monter un studio de jeux de société?

Disto studio est né d’une envie nouvelle pour nous à l’époque, celle de créer un jeu de société. Puis rapidement cette envie est devenue celle de nous autoéditer.

Ce jeu, c’était Strascendance, à l’époque on avait une idée très précise de ce qu’on voulait faire avec et on s’est rapidement rendus compte que l’édition était quelque chose qui nous plaisait beaucoup.

Au moment de créer notre structure on s’est tournés vers Antigone une coopérative d’activité et d’emploi située à Strasbourg. Cette CAE regroupe différents entrepreneurs de secteurs très divers auxquels elle donne accès à des services communs.

Ça nous a permis de nous lancer et de nous développer assez vite tout en évoluant dans un environnement horizontal qui repose sur le partage d’expériences et de connaissances.

C’est quoi, des jeux distordus? Quel est le concept?

Les jeux distordus, ce sont des jeux aux univers atypiques, insolites, où il s’agit parfois de tordre les genres communément rencontrés dans les jeux de société.

On s’est très vite intéressés à la direction artistique de nos jeux qu’on travaille soigneusement et on espère que les joueurs et joueuses seront réceptifs à ça.

En travaillant sur des univers singuliers, on porte forcément une attention à l’immersion, à surprendre, pour donner lieu à une expérience de jeu unique.

 

 

Présentez-nous vos jeux

Pour le moment notre studio a édité 2 jeux.

Le premier, Strascendance, est un jeu de plateau qui s’inspire de l’épidémie de danse qui a touché Strasbourg en 1518.

Dans ce jeu compétitif pour 2 à 5 joueurs vous incarnez un Troublefête qui tente de profiter du chaos provoqué par cette nouvelle épidémie de danse pour prendre le contrôle des différents lieux de la ville.

C’est un jeu avec un univers tout en noir est blanc qui plonge les joueurs et joueuses dans le Strasbourg contemporain hanté par une folie dansante. On a pu lancer la fabrication d’environ 500 boîtes grâce à une campagne de financement participatif sur Ulule en 2019. C’était donc un petit tirage mais on espère pouvoir réimprimer le jeu dès que cela sera possible.

Le second, Ephios, est un jeu imaginé par l’auteur WaDri, et illustré par Quentin Hell.

C’est un jeu de cartes rapide, tactique et évolutif, pour 1 à 4 joueurs, qui se déroule sur une île dystopique nommée (vous l’aurez deviné) … Ephios.

Dans cette cité règne une discorde politique sans précédent qui a ébranlé les grandes alliances de la ville, ce qui a amené le Haut-Gouverneur à prononcer son abdication.

Notre but va être d’unir ces alliances pour gagner en popularité et devenir le ou la nouvelle Haute Gouverneure d’Ephios.

C’est ce genre de jeux assez rapide à prendre en main mais qui révèle, au fil des parties, toute sa profondeur tactique.

Pendant la partie on va essayer d’accumuler des points de persuasion pour convaincre des personnalités influentes de la ville de rejoindre notre main. Ces personnalités pourront être par la suite utilisées (puisqu’elles possèdent toutes un effet différent), ou conservées en main. En effet chaque personnalité appartient à une alliance et lorsque vous avez deux personnalités d’une même alliance en main, vous pouvez unir cette alliance pour gagner de la popularité.

Dès que vous atteignez 70% de popularité vous remportez la partie.

On dit souvent qu’Ephios est un jeu évolutif car le cœur du jeu réside dans son mode campagne.

Dans ce mode vous allez enchaîner les parties et à chaque fin de manche, en fonction de la dernière alliance que vous avez uni, vous allez lire une page du livret de victoires et appliquer des modifications aux paquets de cartes en jeu.

De cette manière de nouvelles alliances vont faire leur apparition, tandis que d’autre quitteront la course, les joies de la politique !

 

Quand seront-ils disponibles?

Strascendance a eu une première sortie boutique en septembre 2020 et on est actuellement en rupture de stock.

Ephios a été financé par une campagne Ulule en avril 2021 et les contributeurs et contributrices devraient recevoir leur jeu en décembre. Une sortie boutique est également prévue début 2022.

Comment ça se crée, un jeu de société?

Vaste sujet et selon nous il n’y a pas une méthode unique pour créer un jeu.

D’autant plus qu’un jeu de société est à la fois créé par l’auteur, l’illustrateur, l’éditeur et même les testeurs.

Finalement créer un jeu de société c’est un travail d’équipe. Donc comment ça se crée un jeu de société, on pourrait dire collectivement.

De notre point de vue d’éditeur, on doit non seulement avoir des notions de gamedesign, savoir quelles sensations et expériences de jeu nous souhaitons que le jeu transmette mais nous devons aussi avoir une sensibilité artistique, graphique et bien entendu prendre en considération la société et le public auquel on s’adresse.

C’est ce qui nous plaît dans ce métier, ce mélange entre la création de mondes imaginaires et la technique qui donne naissance à une boîte de jeu.

Quelles sont les étapes?

Si on prend comme exemple Strascendance (sur lequel on était à la fois auteurs, illustrateurs et éditeurs), dans notre cas on a d’abord une idée, en général un thème, puis une mécanique qui dialogue avec ce thème.

Ce n’est d’ailleurs pas forcément représentatif de comment on crée un jeu, on imagine que chacun a sa façon de faire.

On commence ensuite par déceler un fil conducteur autour de cette idée, quels sont les points fondamentaux (quelles sensations de jeu, quelles mécaniques, etc) pour donner à cet embryon de jeu plus de corps, trouver son essence.

Bien entendu notre côté éditeur intervient déjà durant cette phase, car on essaye d’anticiper si le projet plaira au public, de sentir si l’univers est attrayant, neuf et singulier.

Une fois qu’on a bien défini les prérequis du projet, on réalise les premiers prototypes, déjà avec des intentions graphiques. On y joue beaucoup, d’abord dans notre coin, puis avec des testeurs. À partir de là, on entame un long chemin qui consiste à détecter ce qui ne fonctionne pas, modifier ou supprimer certains aspects du jeu sans toucher à ce fameux fil conducteur. Souvent on essaye d’apporter des modifications qui corrigent plusieurs problèmes en même temps pour ne pas alourdir le jeu. On prend donc beaucoup de notes, des tableaux.

Après plusieurs mois de travail (ça dépend du projet bien entendu) et de tests avec notre cercle proche, on arrive à un prototype présentable au public et qui sera mis à disposition dans des festivals de jeux, des événements, des soirées jeux… On est toujours très attentifs à ces retours du public, à leur ressenti, leur compréhension des mécaniques.

Ces tests nous permettront de confirmer certains points et d’en remettre d’autres en question.  Comme vous l’imaginez bien, la création d’un jeu est un constant va et vient avant d’arriver à la forme du jeu qui nous convient le mieux.

 

 

Quels sont vos projets à venir?

On travaille actuellement en tant que co-auteurs et coéditeurs avec Robin Denaux de Robicop studio sur un jeu hybride, un duel de vaisseaux un peu hors du commun qui se déroule dans l’espace post-apocalyptique.

On consacre notre temps aussi à travailler sur Dear Diary, un jeu qui, à l’origine, nous demande de manipuler des carnets hantés et sur lequel on planche depuis plus d’un an déjà. Il avait été présenté à Cannes sur la Protozone de l’édition 2020 et il subit en ce moment une grosse mise à jour et une re-thématisation.

D’autres projets sont en cours sur lesquels on ne peut malheureusement pas dire grand-chose pour le moment.

Chaque chose en son temps. À savoir qu’on est en constante recherche d’auteur.e.s de jeux de société qui puissent matcher avec le concept Disto studio et ce qu’on défend.

Puis, à côté du travail d’édition, on a développé il y a quelques mois un nouveau service qui propose d’imaginer des jeux sur-mesure pour des entreprises et des associations.

On ne manque donc pas de projets ludiques !

Un secret à partager?

Nous ne l’avons pas encore annoncé publiquement mais on travaille en ce moment sur une nouvelle édition de Strascendance qui devrait cette fois se dérouler à une époque bien précise. On en dit pas plus mais celles et ceux qui connaissent l’histoire du jeu verront probablement où on veut en venir 😉 Merci pour cette interview !

Vous pouvez retrouver Maria et Luc sur le site internet de Disto Studio et sur leur page facebook.

 

  

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